Les certitudes manquent pour expliquer les particularités morphologiques de la race d’Ouessant, notamment sa petite taille. Des hypothèses multiples sont couramment avancées :
La sélection naturelle ?
C’est un facteur à prendre en considération. L’île d’Ouessant (Bretagne), excessivement ventée, dépourvue d’arbres et offrant peu d’abris naturels aurait pu favoriser les petits animaux. Cette explication est partiellement recevable au vu du nanisme qui caractérise les vaches et chevaux sur les îles au climat rude. En 1900, plus de 6000 moutons d’Ouessant se partageaient, avec les vaches et chevaux, les 1562 hectares de l’île.
La sélection humaine ?
Elle joue probablement un rôle important.
Un ouvrage de Françoise Perron, « Ouessant, l’île sentinelle », explique précisément les modalités de l’élevage traditionnel sur l’île. Le système a légèrement évolué au cours des siècles, mais est resté organisé sur l’alternance de l’attache des animaux et de la vaine pâture. Ainsi, entre le 15 mars et la Saint-Michel, les animaux sont-ils attachés par deux sur les parcelles de leur propriétaire ou regroupés dans des enclos communs. En dehors de cette période les animaux circulent sur l’ensemble de l’île, en libre pâture. Cette pratique visait à protéger les champs cultivés et à assurer la survie des familles peu fortunées.
Il y avait donc deux dates importantes :
– le 15 mars (premier mercredi de février actuellement), jour de « foire », où les animaux sont regroupés dans des enclos aménagés aux extrémités de l’île, identifiés grâce aux marques particulières faites aux oreilles (entailles et trous), puis emmenés par leur propriétaire. Les animaux vivent ensuite attachés par deux, au moyen d’une corde de cinq mètres environ qui fixe leur aire de pâture quotidienne.
– le 29 septembre, jour de la Saint-Michel, où les animaux sont « libérés » et regroupés en un troupeau collectif.
Cette pratique ancestrale peut donc avoir favorisé une sélection à rebours. En effet, au 29 septembre, moment de la mise en troupeau commun, toutes les brebis ne sont pas encore saillies. Or, l’Ouessantine, souhaitant probablement maintenir quelques agneaux à l’attache afin de les consommer durant l’hiver, aurait donc eu avantage à entraver ses plus beaux agneaux (les mâles de préférence) et à ne libérer que les plus chétifs avec l’espoir de les consommer plus gros au printemps suivant. Au sein du troupeau collectif, ce seraient alors de jeunes mâles, et les moins développés, qui auraient contribué aux dernières saillies des brebis !
Par ailleurs, la taille du cheptel estimée de 6 à 18 moutons par famille au XIX° siècle, et la finalité alimentaire immédiate, ne favorisaient pas l’entretien d’un beau mâle reproducteur. Au-delà d’un an, les béliers ne grandissent plus guère et leur viande prend un goût plus prononcé, alors pourquoi les conserver alors qu’un agneau mâle peut, dès 4 mois saillir les brebis ?
Mais tout ceci ne constitue qu’une hypothèse de plus. Seules des études approfondies permettront de la valider ou la rejeter.